L'agrile du frêne


 

Apprenez-en plus sur ce ravageur forestier exotique qui cause la mort de nombreux frênes au Québec et ailleurs en Amérique du Nord.

 

 

les risques pour les arbres

L’agrile du frêne est un insecte catégorisé comme un ravageur exotique, soit un insecte nuisible provenant d’une autre région du monde. L’agrile est originaire d’Asie. Dans son environnement naturel, il n’est pas particulièrement dommageable, car il y a des prédateurs qui contrôlent la taille des populations. Au Québec, c’est différent. Comme il n’y a pas assez de prédateurs, l’agrile se multiplie davantage et il atteint des densités importantes.   

 

L’agrile attaque exclusivement les frênes, toutes espèces de frêne confondues. De plus, l’agrile affecte les arbres malades ainsi que les arbres sains. Depuis sa détection en 2002, il a déjà causé la mort de millions d’arbres aux États-Unis et au Canada. Selon les études réalisées aux États-Unis et en Ontario, 99 % des frênes succombent au passage de l’agrile. Les observations à ce jour en forêt québécoise semblent aussi suivre cette tendance. 

 

Identifier l’agrile

L’agrile est un insecte volant sous sa forme adulte. Par contre, c’est sous sa forme de larve qu’il est le plus dommageable pour l’arbre.

 

Caractéristiques de la larve : 

  • Divisée en 10 segments en forme de cloche

  • De forme aplatie

  • Longueur de 26 à 32 mm à maturité

  • Corps blanc crème et tête brune

 

Caractéristiques de l’adulte : 

  • Longueur de 7,5 à 15 mm

  • Couleur vert émeraude brillant et métallique

  • Abdomen rouge cuivré

 

L’agrile au fil des saisons

L’agrile du frêne est un insecte qui réalise son cycle de vie sur une période de 12 mois au cours desquels il se transforme plusieurs fois. Les adultes pondent des œufs en été. Les larves éclosent et grandissent progressivement jusqu’au mois de mai de l’année suivante où elles se transforment en pupes puis en adultes. La nouvelle génération d’adultes émerge, se reproduit et pond de nouveaux œufs. 

 

 

Identifier les frênes 

Les forêts québécoises contiennent plusieurs espèces de frêne, mais trois prédominent : les frênes blancs (ou frênes d’Amérique), les frênes rouges (ou frênes de Pennsylvanie) et les frênes noirs. Les frênes se distinguent des autres espèces par leurs feuilles composées disposées de façon opposées. 

 

Reconnaître un frêne infesté

L’agrile aime la chaleur et, tels les autres ravageurs, il est plus attiré par les arbres affaiblis. C’est pourquoi les premiers frênes touchés d’un secteur devraient être soit bien exposés au soleil, tels des arbres en milieu urbain, en champs ou en bordure de boisé, soit affaiblis, soit les deux. Ces arbres devraient donc être observés en priorité. 

Ensuite, il faut surveiller les signes de dépérissement. Au cours des deux ou trois premières années suivant l’arrivée de l’agrile, les signes sont inapparents ou à peine visibles. Une branche peut dépérir. L’arbre peut prendre ses couleurs automnales plus tôt. Dans les deux à trois années qui suivent, le dépérissement s’accélère, et ce, jusqu’à causer la mort de l’arbre. L’arbre peut jaunir en été. L’arbre perd graduellement ses feuilles à partir de la cime. Des fissures apparaissent sur l’écorce. Des gourmands peuvent pousser sur le tronc. Puis, à un stade avancé de dépérissement, les pics et les écureuils sont très attirés par la forte quantité de larves sous l’écorce. Ces derniers creusent alors des trous ou arrachent l’écorce pour manger les larves. 

 

Notez que ce ne sont pas les pics ni  les écureuils qui provoquent la mort de l’arbre, mais bien l’agrile. D’ailleurs, des études suggèrent que l’activité des pics ralentit la progression de l’agrile. 

 

 

Gestion des arbres et des boisés

EN MILIEU FORESTIER

Il ne faut pas s’empresser de couper tous les frênes en forêt, car certains d’entre eux (1 % selon les études américaines) sont résistants et provoquent la mort des larves qui les consomment. Conserver les frênes de grande qualité pourrait contribuer au maintien de l’espèce et à la transmission de cette résistance. Aussi, plus une forêt est diversifiée, plus elle est résistante ou résiliente aux variations de l’environnement. Maintenir des frênes en santé est un atout  face aux perturbations actuelles et futures. 

 

Ensuite, même si un frêne est affecté par l’agrile, il n’en perd pas sa valeur marchande à court terme. En fait, les billes de bois conservent leur valeur trois à cinq ans après l’attaque initiale, car les dommages de la larve se limitent à la zone immédiate en dessous de l’écorce. 
Pour ces raisons, il est conseillé d’adapter les stratégies d’aménagement, et ce, sans éradiquer complètement les frênes. Voici quelques conseils de base :

  • Récolter les frênes dépérissants;

  • Encourager la croissance d’autres essences ayant des tiges en santé et des diamètres variés;

  • Limiter la récolte pour ne pas favoriser la croissance d’espèces non désirées, tels le nerprun ou le framboisier;

  • Consulter un conseiller forestier pour établir un plan d’aménagement qui répondra à vos objectifs.

 


 

EN MILIEU RÉSIDENTIEL

En milieu urbain ou résidentiel, les arbres sont généralement isolés et bien exposés au soleil. Ils sont aussi plus souvent soumis à des stress comme la pollution, la compaction du sol, etc. Ces facteurs rendent les arbres plus attractifs et vulnérables face à l’agrile.  

Ensuite, la sénescence et la mort d’arbres en milieu urbain ou résidentiel génèrent un risque pour la sécurité des gens. Il faut s’assurer que l’arbre infesté ne risque pas de tomber dans une zone de circulation (sentier, chemin, etc.) ou sur un bâtiment. Si tel est le cas, il est préférable d’abattre l’arbre. Sinon, il est suggéré d’évaluer l’état de santé de l’arbre ainsi que les options à disposition en fonction des règlements municipaux. 

 

Plusieurs villes ou municipalités ont adopté des règlements encadrant la gestion des frênes touchés par l’agrile. Il peut, par exemple, être exigé de traiter ou de couper un arbre dès la confirmation de la présence de l’agrile sur ce dernier. 

Il faut savoir qu’un frêne infesté par l’agrile et montrant des signes de dépérissement ne survivra pas à l’insecte. Il devra être abattu à court ou moyen terme. Par contre, si un arbre est exempt d’agrile ou s’il est en bonne santé malgré la présence de l’agrile, il est possible de le traiter avec un insecticide, le TreeAzinMD. Ce dernier doit être appliqué avant l’apparition de symptômes pour être efficace. De plus, l’efficacité est de durée limitée. C’est pourquoi l’insecticide doit être appliqué aux deux ans. 

 

Appliqué de façon préventive, l’insecticide protège les arbres et évite l’attaque. Sur les arbres faiblement attaqués, le TreeAzinMD a pour effet de tuer les larves. Par contre, si les arbres sont massivement attaqués, les sillons créés par les larves empêchent l’insecticide de se disperser et d’être efficace.

L’insecticide est généralement appliqué sur des arbres de grande valeur, qu’elle soit ornementale, historique ou culturelle.

Le TreeAzinMD n’est pas un insecticide disponible en vente libre. Son usage est réservé aux professionnels détenant les accréditations nécessaires. Généralement, il s’agit d’arboriculteurs. N’hésitez pas à les consulter. Nombre d’entre eux peuvent confirmer la présence d’agriles, évaluer l’état de santé des arbres, les traiter ou les abattre. 

 

 

Gestion du bois contaminé

Plusieurs éléments sont à considérer avant de couper, déplacer et transformer le bois de frêne contaminé ou potentiellement contaminé. 


1. Les larves peuvent vivre et poursuivre leur cycle de vie dans une bille ou une bûche. Cela veut dire que les larves peuvent compléter leur croissance, se transformer en adultes et émerger pour coloniser un nouvel arbre après la coupe de l’arbre. Ainsi, couper un arbre infesté sans s’occuper du bois n’enraie pas la propagation locale et transporter du bois infesté peut propager l’agrile. 

 

2. Pour éliminer l’agrile du bois, il faut disposer du bois correctement ou déléguer cette tâche. On peut s’occuper de l’arbre entier ou uniquement des parties potentiellement infestées, soit la cime, l’écorce et la couche fine d’aubier (bois en surface) touchée. Pour cette deuxième option, il faut écorcer les billes de bois et retirer 1 cm d’aubier. Enfin, le traitement de l’arbre ou des résidus consiste à déchiqueter le tout en copeaux d’une largeur maximale de 2,5 cm dans toutes les directions. On peut aussi brûler les résidus. 

 

3. Les larves d’agrile demeurent à la surface du bois directement sous l’écorce. La bille est donc intacte et peut être utilisée par l’industrie de la transformation du bois. Ainsi, une bille de frêne infestée peut être vendue à condition qu’elle respecte les normes de qualité des acheteurs.

 

 

BOIS ISSU DES FORÊTS 

Le bois de frêne a une valeur intéressante. Il se destine à quatre types de produit (classés par ordre décroissant de valeur) : le sciage, la palette, la pâte pour les papiers et les cartons et le bois de chauffage. 

Normalement, la présence d’insectes dans le bois réduit la valeur des billes offerte par les usines de transformation du bois, mais la présence d’agriles est une exception. Il ne faut pas hésiter à vendre ce bois aux transformateurs, d’autant plus qu’ils sont équipés pour bien écorcer les billes et par conséquent, limiter la propagation de l’agrile. 

Chaque acheteur a des besoins précis en termes de taille et de qualité des billes. Il est important de vérifier ses besoins avant de débiter les billes afin de les façonner adéquatement et de trouver preneur pour notre bois. Voici la moyenne des tailles à respecter en fonction des produits :

 


 

BOIS URBAIN OU RÉSIDENTIEL

Le bois issu des villes ou des secteurs résidentiels est peu intéressant, voire refusé, par les usines de transformation du bois, car ce bois présente généralement des défauts le rendant inutilisable. Parmi ces défauts, il y a la présence de métal (ex. un clou planté dans l’arbre qui a été englobé par la croissance de ce dernier) et d’une quantité importante de nœuds (courant chez les arbres ayant poussé en milieu ouvert). 

Il existe néanmoins d’autres options. Si vous engagez un arboriculteur pour la coupe de vos arbres, ces spécialistes offrent généralement de disposer adéquatement du bois. Sinon, la majorité des écocentres locaux acceptent le bois de frêne touché par l’agrile. 

Il existe aussi diverses initiatives locales pour valoriser le bois de frêne. Par exemple, certaines entreprises transforment ce bois en mobilier urbain. Une formation est aussi offerte aux arboriculteurs afin de les informer sur les techniques de débitage des bois visant à les rendre utilisables par les entreprises de transformation. Se faisant, le bois peut être vendu et cela peut potentiellement réduire la facture d’abattage. 

 

Limiter la progression de l’agrile

Naturellement, l’agrile se déplace peu, soit de quelques kilomètres par année. Toutefois, comme les larves vivent sous l’écorce et qu’elles peuvent survivre dans du bois coupé, le déplacement de billes ou de bûches est la cause principale de la propagation de l’espèce sur de longues distances. Le déplacement de frêne est donc réglementé par l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Il est interdit de déplacer du bois de frêne ou tout bois de chauffage d’une zone réglementée vers une zone non réglementée sans être accréditée. Depuis janvier 2018, tout le sud du Québec est inclus dans la zone réglementée. Alors, le déplacement du bois est peu limitatif au sens de la loi. Il est toutefois non recommandé de déplacer du bois de chauffage infesté d’une zone connue pour sa présence de l’agrile vers une zone où l’agrile semble être absent. Il est aussi préférable d’abattre les frênes entre le 1er octobre et le 15 mars. D’ailleurs, certaines municipalités peuvent l’exiger. Au cours de cette période, les larves d’agriles sont inactives. Par conséquent, elles ne peuvent pas se propager si le bois est écorcé ou transformé avant le 15 mars. 

 

En tant que citoyen, il faut porter une attention particulière au bois de chauffage. Celui-ci est constitué presque toujours de bois mélangé, incluant une part de frêne. Il est donc fortement conseillé d’utiliser du bois local à tout moment. Par exemple, en camping, il est préférable d’utiliser le bois local plutôt qu’apporter du bois. Ensuite, il est préférable de ne pas ramener les restes de bois. Ces deux mesures visent à protéger autant les sites de villégiatures que nos forêts environnantes.  

 

 

Télécharger la fiche PDF

Retour à la recherche

Suivez l’actualité de l’AFSQ   

S'abonner à l'infolettre